TW VIOL
J'ai un peu hésité avant d'écrire ce texte. J'avais déjà lu plusieurs
témoignages de viol, souvent très violent, souvent très violents et je
ne me sentais pas assez légitime. J'avais l'impression que mon
expérience était négligeable en comparaison. J'avais aussi peur d'avoir
également à subir les assauts habituels que doivent supporter les
victimes de viol. J'ai pas réellement à me séparer de ces craintes, mais
j'ai besoin d'en parler.
Ça n'a pas été la première fois, mais
c'est la seule que je réussi à resituer précisément dans le temps et
auquel j'arrive à associer un visage à mon agresseuse.
Pour
commencer, je suis obligé de remettre quelques points de contexte :
j'ai pas mal de difficultés psychologiques depuis très longtemps, du
coup à la période où c'est arrivé, Du coup, lorsque c'est arrivé,
j'étais hospitalisée dans une clinique soins-études depuis 3 ans
(structure semi ouverte). Un milieu protégé, donc. Ça n'a pas empêché ce
qui s'est passé.
Ma scolarité avait été très difficile à
l’extérieur et j'avais besoin d'un endroit qui me permettrait d'évoluer à
l'abri. Ça a marché un temps. J'ai avancé, je suis devenu plus
sociable, je faisais plus attention aux autres...
Cette fille est
arrivée lors de ma 3ème année dans le centre. Elle avait une certaine
influence sur les autres. Au début, je n'avais pas réellement
d'animosité envers elle, mais au bout d'un moment, elle a commencé à me
prendre pour cible.
Elle prenait un malin plaisir à me harceler, à
m'humilier constamment, entraînant les autres avec elle. Je me souviens
avoir eu peur de sortir de l'aile où j'habitais de crainte de la
rencontrer.
Et puis un jour, avec quelques autres patients, on
était assis dehors et elle m'a mis un doigt dans le cul pour "rigoler".
Ça n'a l'air de rien dit comme ça mais si on prend la peine de se
renseigner sur les violences sexuelles, on comprend que c'est un acte
très grave.
J'ai pas réalisé de suite la violence de ce que j'avais subi. Mon séjour s'est terminé difficilement j'ai changé de ville.
Vers
cette période, j'ai commencé à venir régulièrement sur twitter et que
j'ai commencé mon initiation au féminisme. Lors d'une conversation,
j'ai vu passer la définition du viol dans la législation française « Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit,
commis sur la personne d’autrui, par violence, contrainte, menace ou
surprise, est un viol. » (Article 222.23 du Code pénal) _je précise
que je ne suis pas d'accord avec la définition qu'en fait le système
pénal de mon pays que je trouve trop restrictive, selon moi, elle
devrait également inclure toutes les formes d'attouchements non
consentis_ en lisant ça, j'ai repensé à mon expérience et j'ai posé des
questions pour confirmer ce que je craignais : oui, c'était bien un
viol.
Le truc, c'est qu'en comprenant enfin que mettre le doigt
dans le cul de quelqu'un sans son consentement, c'est déjà un viol, j'ai
également réalisé que ce n'était pas non plus la première fois que ça
m'était arrivé, j'avais déjà connu ça au collège. Quand j'y étais (et je
ne pense que c'est encore le cas), c'était un «jeu» qui se pratiquait fréquemment. Entre garçons, en tout cas.
Je
sais que beaucoup ont du mal à voir ça pour ce que c'est, qu'on pense
que c'est juste un jeu inoffensif, mais c'est pourtant d'une violence
inouïe. C'est s'attaquer à ce qu'il y a de plus intime chez un individu.
C'est triste à dire mais même dans mon entourage,
j'ai du mal à me faire entendre sur ce sujet. Un.e proche, qui reconnaît
néanmoins pour ce que c'est ce que j'ai vécu (c'est déjà ça), m'a
raconté.e en rigolant récemment les «jeux» de ses amis qui
ressemblait furieusement à ceux que, moi, j'avais pu subir. Parce que
là, c'était entre potes, ça devenait amusant alors que dans les faits,
c'était
Quand j'ai dit ce que j'en pensais, j'ai eu droit au classique, mais néanmoins toujours aussi affligeant, «Pff, t'as pas d'humour. T'es psycho-rigide.».
Autant dire que sa réponse, je ne l'ai toujours pas digéré.
Je
ne porterais pas plainte contre la fille qui m'a violée. J'ai
suffisamment eu d'échos sur les réactions des flics quand on se confie à
eux sur ce genre de sujet pour m'en dissuader. Quand on est victime de
ça, qu'importe le genre, on est victimes de moqueries et de
culpabilisations, et même si l'on n'est pas à l'abri d'une bonne
surprise, je préfère ne pas prendre le risque.
En tant qu'homme
(enfin, il parait, j'en suis moi même plus tout à fait sûr), le
patriarcat attend de moi que je sois fort, à ce que je ne puisse pas
faire preuve de faiblesse. J'ai le droit d'être un agresseur, mais pas
une victime, sinon je fais honte à mon genre.
J'aimerais qu'un jour, il soit plus facile d'être victime qu'agresseur.
EDIT : après un an, je suis effectivement pas un homme, fait coming out trans, mais ça change pas vraiment le contexte de ce qui s'est passé, vu que je me présentais pas comme une personne trans à cette période là
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